C'est une enquête en forme de cri d'alarme pour les syndicats. Selon un sondage de l'IFOP, réalisé le 25 mai auprès d'un échantillon de 3 373 personnes, et publié parL'Humanité du 28 mai, le vote en faveur du Front national aux élections européennes a gagné du terrain dans tous les syndicats, par rapport à l 'élection présidentielle de 2012.
Le premier constat est relativement rassurant pour les centrales : si 30 % des salariés ont voté pour le FN (64 % se sont abstenus), ils sont 25 % chez les salariés proches d'un syndicat contre 34 % pour ceux qui n'affichent aucune proximité syndicale.
Mais dans le détail, les choses se gâtent : l'extrême droite a recueilli 33 % chez les salariés proches de FO, 29% chez les sympathisants d'un autre syndicat (CFTC, CFE-CGC ou UNSA), 22 % chez ceux de la CGT, 17 % chez ceux de la CFDT et —plus surprenant encore — 27 % chez les sympathisants deSolidaires, syndicat plutôt proche de l'extrême gauche et du Front de gauche.
A la CGT, qui a lancé, en janvier, une campagne commune avec la FSU et Solidaires, contre les idées du Front national, le vote lepéniste progresse : il est passé de 16 % à la présidentielle de 2012 à 22 %, une hausse de six points.
Chez les sympathisants de cette centrale (52 % d'abstentions), c'est sans surprise le Front de gauche qui est arrivé en tête (30 %), les listes du Parti socialiste et du Parti radical de gauche (PRG) obtenant 19 % et celles de l'extrême gauche 5 %. Chez les sympathisants de Solidaires, où 57 % se sont abstenus, le PS arrive, avec 19 %, juste derrière le FN et devant le Front de gauche et Europe Ecologie qui sont à égalité à 17 %, l'extrême gauche n'obtenant que 2 %.
A la CGT, journée de grève et de manifestations « en riposte » le 26 juin
Chez les sympathisants de Force ouvrière, centrale politiquement très hétérogène, l'abstention monte à 61% — un record —, les listes PS-PRG obtiennent 15 %, devant Europe Ecologie (13 %), le Front de gauche (11 %), l'UMP (8 %) et l'extrême gauche (5 %).
C'est la CFDT qui résiste le mieux à la vague FN — ses sympathisants ayant voté à 17 % pour les listes de Marine Le Pen — et c'est aussi celle où on s'est le moins abstenu (45 %).
Chez ceux qui affichent une proximité syndicale avec la CFDT, les listes PS-PRG arrivent nettement en tête avec 29 %, celles de l'UDI et du MoDem obtenant 16 % devant Europe Ecologie (9%) et l'UMP, tous les deux à 9 %, loin devant le Front de gauche (3 %).
Solidaires a vivement réagi à la publication de ce sondage en demandant « des informations complémentaires sur une méthodologie qui à l'évidence est source de marges d'erreur phénoménales ».
Pour le syndicat, qui tient son congrès à partir du lundi 2 juin à Dunkerque (Nord) — en même temps que la CFDT à Marseille — « le combat contre l'extrême droite est une chose sérieuse. (...) Balancer dans la nature des chiffres fantaisistes n'aide pas celles et ceux qui mènent ce combat.»
A la CGT, on ne cache pas une réelle inquiétude en notant que, « même si ce n'est pas une surprise, on ne peut se satisfaire du score du vote FN ». Thierry Lepaon a annoncé à l'AFP une journée de grève et de manifestations le 26 juin « en riposte »au résultat des élections européennes et avant la conférence sociale des 7 et 8 juillet.
Selon le secrétaire général de la CGT, « il y a deux sorties de crise possible, celle brutale où nous mènent la droite, le Front national et aussi parfois le gouvernement, et une sortie de crise progressiste sur laquelle nous travaillons ». Le 26 juin, la CGT risque de se retrouver bien seule...