Le 27/05/2014
Nantes TAN : tension sur toutes les lignes
Le coup de sang d’un conducteur de tram, vendredi, semble traduire une certaine colère face aux incivilités.
Le sujet est ultrasensible. Direction et syndicats de la SEMITAN jouent la carte de l’apaisement. Sur ce point, au moins, ils s’accordent.
Et commentent du bout des lèvres le coup de sang d’un conducteur de tram, vendredi sur la ligne 1. « Pour le moment, nous sommes dans l’attente des conclusions de la justice, indique l’entreprise. L’enquête est en cours : les vidéos ont été notamment réquisitionnées par la police »
« Cela aurait pu arriver à n’importe lequel d’entre nous »
Sur la bande, on voit l’employé de la TAN, armé d’une cale, asséner un coup sur le crâne d’un passager. C’était en plein après midi vendredi à la station Souillarderie.
« Deux marginaux, alcoolisés, se querellaient et importunaient le reste de la clientèle. Il a voulu s’interposer et leur demandé de sortir » indique une source proche du dossier.
Le voyageur acariâtre s’en sort avec une demi-douzaine de points de suture. Le parquet attend toujours son incapacité totale de travail pour orienter la procédure.
Le conducteur mise en cause est en arrêt maladie. Comment ce trentenaire décrit comme quelqu’un de « très calme » a-t-il pu franchir la ligne jaune ? « La pression » avancent les uns. « Les conditions de travail se dégradent » avancent les autres. Depuis des mois, les syndicats tirent la sonnette d’alarme.
Ils demandent le respect des temps de repos et se plaignent de l’augmentation des incivilités et des violences. Sur la ligne 1 du tramway notamment. L’an passé, 1981 agressions, incidents ou dégradations de biens constatés sur le réseau contre 1533 en 2012.
« Franchement, nous sommes sur les nerfs, témoigne un conducteur chevronné. Le geste de notre collègue est inexcusable mais compréhensible. Cela aurait pu arriver à n’importe lequel d’entre nous. »
Ils réclament plus d’uniformes
Responsables syndicaux et direction se sont rencontrés hier après midi. Un comité d’hygiène et de sécurité extraordinaire doit se tenir aujourd’hui. L’occasion de réclamer, à nouveau, une présence accrue de policiers et d’agents de prévention. (Ndlr : ils sont 80 aujourd’hui) aux points chauds du réseau. « Cela n’empêchera pas tous les incidents mais permettra de calmer le jeu. »
Rémi Certain
Le chiffre :
487
Selon la direction, il s’agit du nombre d’agressions contre des personnels de la SEMITAN en 2013. Quatorze d’entre elles ont entrainé une incapacité de travail. En tout, l’an passé, 1981 agressions, incidents ou dégradations de biens ont été constatés sur le réseau contre 1533 en 2012. (dont 423 agressions contre les employés).
Ce sont les conducteurs de bus et les contrôleurs qui subissent le plus d coups, injures, bousculades et autres crachats. Les atteintes aux clients sont elles, passées de 1227 à 1694 entre 2012 et 2013. Les plus marquantes sont les décompressions de portes ou tirages d’alarme, les problèmes liées à l’alcool, drogue et tabac, et les violences physiques entre clients.
ZOOM :
Pas de sentiments d’insécurité chez les usagers
Police. Station commerce hier après-midi. Léa, Marie et Zoé discutent tranquillement. Le tram, c’est le mode de transport préféré des lycéennes. L’insécurité ? « On n’a pas ce sentiment. On voyage souvent en groupe, cela joue peut-être. On entend parler des agressions ou de vols mais on n’a jamais été confrontées à ça » expliquent les jeunes filles qui avouent « faire quand même attention » à leurs portables quand elles montent ou descendent de la rame.
L’an dernier, les douze policiers de la brigade de surveillance des transports en commun (BSTC) ont interpellé 478 personnes.
Soit 10% de plus qu’en 2012. Ces policiers spécialisés peuvent recevoir le renfort d’autres unités. En 2013 toujours, ils ont accompagnés 698 lignes de bus ou de tram et sécurisé 8303 arrêts. Pour rappel, la SEMITAN a assuré 126,6 millions de voyages l’an dernier.
« Pas besoin de milice à bord des trams »
Le mouvement d’extrême droite Génération Identitaire a investi la ligne 1 vendredi pour « sécuriser » le tram.
L’initiative dérange. Pour ne pas dire plus. Vendredi soir, une vingtaine de « blousons jaunes » a investi la ligne 1 du tramway. Le but ? « Sécuriser les transports en commun ». A l’origine du mouvement figurent des mebres de Génération identitaire, un groupe d’extrème droite.
Le mouvement jeunesse du Bloc Identitaire n’en est pas à son coup d’essai. Des opérations du même type ont eu lieu dans les métros de Lille, Paris ou Lyon. Elles étaient alors baptisées « opérations anti-racailles ». Tout un programme…
« Nous n’avons pas besoin de milice à bord des trams, gronde un conducteur de la SEMITAN. Les risques de dérapage lors de ce genre d’actions, qui n’a aucun cadre légale, est fort. On connaît les difficultés de la prévention et de la médiation. Ce n’est pas à un système de protection citoyen d’agir mais au politique. »
A Waldeck-Rousseau justement, le directeur départemental de la sécurité publique rappelle que la sécurité sur le réseau des transports en commun est d’abord l’affaire de la SEMITAN, « en étroite collaboration » avec la police. « Mais monter dans un tram avec des chasubles et dire que cette présence rassure ne tombe pas sous le coup de la loi, explique Jean Christophe BERTRAND. Ce qui est illégal, c’est usurper un pouvoir que l’on n’a pas : contrôler les voyageurs, les inviter à descendre… »
Sous étroite surveillance policière, l’action de vendredi est restée dans les clous. Mais ce n’est pas toujours le cas. Mi-avril à Lyon, « une tournée de sécurisation » des identitaires avait dégénéré. Pris à partie par des usagers et des militants d’extrème gauche, ils avaient dû être exfiltrés du métro par la police.
R.C