Un label unique pour répondre aux défis de la multiplication des « labels-outils marketing » :
-> Encore considérés comme appartenant à un marché de niche il y a quelques années, les produits labellisés issus du commerce équitable, bio, verts, solidaires ou encore « éco conçus », visent un public grandissant de nouveaux consommateurs « éco-citoyens ». Cependant, certaines entreprises récupèrent le concept en apposant des logos sans fournir de garanties sérieuses.
-> De fait, le foisonnement de labels pose la question de la crédibilité de la démarche de certaines entreprises et de la confiance que les consommateurs peuvent y accorder. Les dernières années ont en effet vu l’explosion de labels extrêmement variés dans de nombreux domaines, dont plusieurs ont été autoproclamés par certaines entreprises, et sont aujourd’hui jugés sans véritable valeur ajoutée (environnementale ou sociale).
-> Cette situation a entraîné une grande confusion pour le consommateur : les labels, qui sont supposés garantir une qualité environnementale et sociale accrue avec une traçabilité forte, et orienter les consommateurs vers des achats plus responsables, ont désormais une lisibilité brouillée. La redondance des labels n’est pas à même d’éclairer les choix du consommateur dans son comportement d’achat.
Un label pour aider les entreprises françaises dans une économie mondialisée :
-> La crédibilité d’un label suppose que des contrôles indépendants puissent vérifier l’effectivité du respect des engagements des entreprises. Faute de législation internationale contraignante ou de corps mondial d’inspecteurs du travail, il n’y a pas de véritables moyens de le vérifier. Sous la pression des ONG, beaucoup d’entreprises ont établi des codes de bonne conduite et font réaliser des audits. Mais, dans la très grande majorité des cas, ils sont inefficaces. Beaucoup se servent de ces outils pour afficher une image vertueuse.
-> La montée de la responsabilité sociale des entreprises au niveau international ouvre cependant des perspectives d’évolution. Le principal problème demeure cependant les pratiques d’achat, c’est-à-dire la façon dont les entreprises passent des contrats avec leurs fournisseurs pour avoir les prix les plus bas, sans se soucier des conditions de travail.
-> Depuis des années, les entreprises françaises livrent une compétition à armes inégales avec de nombreux concurrents étrangers, en raison du refus de l’OMC de prendre en compte le facteur humain et social dans la mise en œuvre des règles du commerce mondial.
-> Dans les faits, la mondialisation de l’économie avantage les producteurs dont les comportements sont les moins sociaux, ce qui joue toute à la fois contre les économies les plus socialement développées comme la France, et contre le développement des pays émergents. En effet, il existe une distorsion de concurrence permanente entre les entreprises respectueuses des droits fondamentaux de leurs salariés, et celles pour qui la main d’œuvre n’est qu’un objet dans la chaîne de production.
-> Face à l’interdiction de prendre en compte la dimension sociale dans l’évaluation des règles de concurrence au sein du commerce mondial, il apparaît de plus en plus nécessaire de faire respecter les normes fondamentales édictées par l’OIT. Cela passe par une meilleure information du consommateur qui, aujourd’hui – faute d’information – n’est pas en mesure d’arbitrer entre le prix d’un produit et le respect des salariés et de l’environnement. Dès lors, la mise en œuvre d’un label « traçabilité sociale », facilement identifiable par exemple par une pastille de couleur sur les produits, est susceptible de garantir à l’acheteur qu’un certain nombre de normes fondamentales ont été respectées. En outre, un produit ou une marque ainsi labellisé verra son image fortement revalorisée, ce qui devrait sans aucun doute intéresser de nombreuses entreprises.
La montée en charge de la labellisation pourrait se faire progressivement, secteur par secteur. Il serait par exemple possible de cibler, dans un premier temps, le secteur du jouet, porteur d’une valeur symbolique (le travail des enfants), pour ensuite s’attaquer à des secteurs plus sophistiqués (secteur de l’automobile).
Un label original imaginé par la CFTC, proposé aux pouvoirs publics français :
-> Le fait de maintenir et de créer des emplois de qualité en France n’est pas inconciliable avec le développement d’un véritable salariat sur le reste de la planète. Selon une récente étude du CREDOC, près d’un Français sur deux (44 %) tiendrait compte, lors de ses achats, des engagements pris par les entreprises en matière sociale.
-> En toute logique, il devrait revenir à l’Union Européenne d’imposer peu à peu une réelle « traçabilité sociale » des produits et des services. En effet, en théorie, le libéralisme économique est favorable à la transparence de l’échange commercial. Il suffirait que 15 % des consommateurs se mettent à choisir leurs achats en fonction de leur « traçabilité sociale », pour que l’ensemble des entreprises se mobilise sur leur responsabilité sociale, et qu’un véritable marché se crée, attirant par voie de conséquence les industriels.
La CFTC a imaginé l’élaboration d’une « traçabilité sociale » des produits et des services, représentée physiquement par un label (un étiquetage) tenant compte des conditions sociales de production dans les pays concernés.
-> Ce label permettra d’aller plus loin que celui concernant le commerce équitable, en créant une discrimination positive en faveur des entreprises considérées comme socialement responsables. Il garantira aux consommateurs que, tout au long du processus de fabrication et de distribution d’un produit donné, les personnes qui y ont contribué ont été respectées (non travail des enfants, salaires décents, liberté syndicale, etc.).
-> A l’image du Comité intersyndical de l’épargne salariale créé en 2002 (CIES), une instance réunissant des syndicalistes, des élus, des chefs d’entreprise, et des associatifs – que l’on pourrait appeler « comité de la traçabilité sociale » – accorderait son label à des produits et services en fonction d’un cahier des charges clair, et à partir de six critères précis :
- Le respect de la liberté syndicale et du dialogue social
- L’existence d’un système de protection sociale
- L’évolution des salaires
- Le respect de conditions de travail décentes
- Le respect de la qualité de l’emploi
- Le non travail des enfants.
-> Un tel label aiderait le consommateur à faire un choix éthique, tout en lui donnant le pouvoir de favoriser les produits et services respectant les droits fondamentaux du travail et des salariés. Une fois informé par la présence du label sur un produit donné, le consommateur saura si le produit qu’il achète respecte les normes fondamentales de l’OIT. La plupart des États ont effectivement signé ces conventions – contre le travail des enfants, pour des salaires décents, pour la liberté syndicale – mais le commerce international en lui-même n’oblige pas les Etats à les respecter.